La ville de Québec ne compte qu'environ 1% d'anglophones. En connaître est conséquemment chose relativement rare.
Eh bien, croyez-le ou non, j'en connais personnellement 3 et j'aimerais explorer avec vous pourquoi ils sont si bien intégrés à Nous (les prénoms sont fictifs).
Il y a tout d'abord Albert (qui prononce sont prénom à la française), d'origine irlandaise, qui s'exprime avec un mélange d'accent anglais et de la basse-ville de Québec d'où il est originaire. Toujours souriant malicieusement derrière ses moustaches rousses, il est le jovial compagnon de tous.
Il y a aussi Carolyn, originaire de Toronto, mais vivant par choix à Québec depuis 30 ans, tout son âge adulte en fait. Elle a eu le coup de foudre pour le style de vie plus relax et ses habitants et elle y est restée depuis. Son français demeure un tantinet ardu, le masculin et le féminin des mots semblant parfois dépendre de l'inspiration du moment, mais sa bonne humeur constante et son désir de se perfectionner sont des atouts indéniables à son acceptation totale. Ses élèves l'adorent.
Il y a aussi George, de Québec, au sens de l'humour très développé, à l'accent à peine perceptible, qui a toujours le mot pour rire, et qui possède des talents d'homme à tout faire qui le rendent très recherché.
Albert et George ont dû aller à l'école anglaise à une époque où l'enseignement du français devait être minime. C'est pourquoi ils s'expriment avec le niveau de langage populaire de la rue. On sent qu'il ne leur est jamais venu à l'idée de quitter Québec pour une ville anglophone ; ils se sentent bien ici et aiment y vivre à la québécoise.
Une explication de leur parfaite intégration tient au fait que les 3 baignent dans l'environnement culturel francophone et y adhèrent. Il m'arrive de les entendre fredonner des chansons québécoises, Carolyn suit le travail théâtral de Robert Lepage, Albert adore la musique traditionnelle, George lit le Journal de Québec, etc. Même que Carolyn a envoyé sa fille unique à l'école française.
Je ne les ai pratiquement jamais entendu parler anglais. En conversation, ils n'essaient jamais de nous faire changer pour l'anglais. Ils ne nous abordent jamais en anglais non plus. Bref, ils comprennent qu'au Québec on vit en français, et ils sont heureux de le faire.
Devant tant de bonne volonté manifeste, ils sont acceptés de tous et jamais personne ne les traite d'anglos.
Le succès de leur intégration tient sans doute partiellement au fait que les anglophones sont une infime minoritéà Québec. S'ils étaient 40%, la situation serait certainement fort différente.
L'intégration harmonieuse pour les anglophones est chose possible, moyennant un peu de bonne volonté, et le désir de se joindre à l'identité culturelle qui est la nôtre. Car il y aura toujours de la place pour ceux qui voudront en faire sincèrement partie.
Réjean Labrie
Les photos de Québec : la marina, la Place d'Youville, la Chaussée des Écossais, l'Hôtel de ville illuminé.